- Ch'VAAAvAAAR, crabe-surfiguratif que l'on doit à Jacques Caude. Ch'Vavar en picard-bercquois signifie Le Crabe. - |
En
échos au prix Nobel de littérature décerné à Bob Dylan.
(Ici,
la figure mythologique est Bob Dylan)
La
chanson (lettre d' Ivar Ch'Vavar à Florian Caschera, 26 juin 2016)
Cher
Florian, la chanson n’est pas « l’antichambre » de la
poésie, ni un genre poétique, une sous-division de la poésie :
c’est un art à part, mais à part entière, de plein droit et de
plein exercice.
Il
ne faut pas penser la chanson dans le cadre de la poésie. La
chanson, c’est du texte (souvent « poétique ») et de
la musique, mais ce n’est pas la somme des deux, c’est la ligne
de contact et de travail entre les deux. Par « travail »
j’entends que le texte est travaillée par la musique et la musique
par le texte, ils sont travaillés l’un par l’autre. Ils ont
aussi un travail, une construction à faire ensemble.
Il
me semble que tous les problèmes qui se posent à ceux qui écrivent
/ composent les chansons – se posent sur cette ligne-là.
Évidemment, ils rencontrent aussi les problèmes que rencontrent les
poètes et ceux que rencontrent les musiciens, mais toujours ils vont
revenir à cette ligne et c’est sur cette ligne qu’ils vont avoir
à traiter leurs problèmes propres.
Un
auteur-compositeur peut aussi, à ses heures, n’être « que »
poète, « que » musicien. Comme un écrivain peut être
aussi peintre ou chorégraphe, c’est-à-dire, à certains moments,
n’être « que » peintre ou « que »
chorégraphe. Je mets des guillemets parce que ce « que »
n’est pas dépréciatif, mais aussi parce que ça n’est
probablement jamais vrai qu’un créateur à un moment ne soit
« que » ceci ou cela : même quand il peint avec ses
encres et son café, Hugo reste un poète, ne fait pas complètement
taire en lui le poète, même si, peut-être, il s’y efforce.
Mais
dans son travail d’auteur-compositeur, à supposer même qu’à un
moment il est sur son texte, à un autre moment sur sa musique, celui
qui écrit une chanson ne peut traiter ses poèmes d’écriture
comme un « pur » écrivain, ni ses problèmes musicaux
comme un « pur » musicien : toujours il doit les traiter
d’abord en fonction de la ligne, sur la ligne même où le texte et
la musique se joignent.
Bien
sûr il y a des chansons où le texte est venu sur la musique, ou la
musique sur le texte. Il y a le cas classique où un poème est « mis
en musique », et ça peut effectivement arriver à faire une
chanson... La ligne de la chanson n’est justement pas une ligne de
démarcation ! Mais il me semble que si un auteur-compositeur ne doit
rien s’interdire, il a à creuser tout de même ce que l’art
appelé chanson a de spécifique. Sinon il se considérera toujours
comme un demi-poète et un demi-musicien, ou seulement un
demi-poète s’il n’écrit que les paroles, un demi-musicien s’il
ne fait que composer les musiques... Alors que, même s’il n’écrit
que les paroles ou que la musique, il travaille à la chanson, qui
est un art à part entière.
Bon,
tout cela doit être assez confus ! et c’est vrai que je ne suis
pas le plus qualifié pour parler de la chanson. – Tout de même,
j’ai cette expérience : de n’avoir jamais pu écrire une vraie
chanson (encore je ne parle ici que du texte !), même si toute ma
vie j’aurais voulu le faire !
Fraternellement
à toi,
Ivar