jeudi 12 avril 2018

UNE LETTRE D'IVAR CH'VAVAR

-  Ch'VAAAvAAAR, crabe-surfiguratif
que l'on doit à Jacques Caude.
Ch'Vavar en picard-bercquois
signifie Le Crabe. -


En échos au prix Nobel de littérature décerné à Bob Dylan.
(Ici, la figure mythologique est Bob Dylan)
 La chanson (lettre d' Ivar Ch'Vavar à Florian Caschera, 26 juin 2016)

Cher Florian, la chanson n’est pas « l’antichambre » de la poésie, ni un genre poétique, une sous-division de la poésie : c’est un art à part, mais à part entière, de plein droit et de plein exercice.
Il ne faut pas penser la chanson dans le cadre de la poésie. La chanson, c’est du texte (souvent « poétique ») et de la musique, mais ce n’est pas la somme des deux, c’est la ligne de contact et de travail entre les deux. Par « travail » j’entends que le texte est travaillée par la musique et la musique par le texte, ils sont travaillés l’un par l’autre. Ils ont aussi un travail, une construction à faire ensemble.
Il me semble que tous les problèmes qui se posent à ceux qui écrivent / composent les chansons – se posent sur cette ligne-là. Évidemment, ils rencontrent aussi les problèmes que rencontrent les poètes et ceux que rencontrent les musiciens, mais toujours ils vont revenir à cette ligne et c’est sur cette ligne qu’ils vont avoir à traiter leurs problèmes propres.
Un auteur-compositeur peut aussi, à ses heures, n’être « que » poète, « que » musicien. Comme un écrivain peut être aussi peintre ou chorégraphe, c’est-à-dire, à certains moments, n’être « que » peintre ou « que » chorégraphe. Je mets des guillemets parce que ce « que » n’est pas dépréciatif, mais aussi parce que ça n’est probablement jamais vrai qu’un créateur à un moment ne soit « que » ceci ou cela : même quand il peint avec ses encres et son café, Hugo reste un poète, ne fait pas complètement taire en lui le poète, même si, peut-être, il s’y efforce.
Mais dans son travail d’auteur-compositeur, à supposer même qu’à un moment il est sur son texte, à un autre moment sur sa musique, celui qui écrit une chanson ne peut traiter ses poèmes d’écriture comme un « pur » écrivain, ni ses problèmes musicaux comme un « pur » musicien : toujours il doit les traiter d’abord en fonction de la ligne, sur la ligne même où le texte et la musique se joignent.
Bien sûr il y a des chansons où le texte est venu sur la musique, ou la musique sur le texte. Il y a le cas classique où un poème est « mis en musique », et ça peut effectivement arriver à faire une chanson... La ligne de la chanson n’est justement pas une ligne de démarcation ! Mais il me semble que si un auteur-compositeur ne doit rien s’interdire, il a à creuser tout de même ce que l’art appelé chanson a de spécifique. Sinon il se considérera toujours comme un demi-poète et un demi-musicien, ou seulement un  demi-poète s’il n’écrit que les paroles, un demi-musicien s’il ne fait que composer les musiques... Alors que, même s’il n’écrit que les paroles ou que la musique, il travaille à la chanson, qui est un art à part entière.
Bon, tout cela doit être assez confus ! et c’est vrai que je ne suis pas le plus qualifié pour parler de la chanson. – Tout de même, j’ai cette expérience : de n’avoir jamais pu écrire une vraie chanson (encore je ne parle ici que du texte !), même si toute ma vie j’aurais voulu le faire !
Fraternellement à toi,
Ivar




COMME DES FOURMIS sur notre thé



Comme des fourmis sur notre thé

(Ici, les figures mythologiques sont Roland Van Campenhout,
John Lee Hooker, Sonny Boy Williamson, Willie Dixon,
le Captain Beefheart & his Magic Band et Arno Hintjens)

À Roland Van Campenhout
Comme des fourmis flottant sur notre thé, de vos vies, souvenez-vous de même pas plus loin de 20 ans et regardez déjà ce temps… Voyez, la grande ville, Lille, a tellement changé que nos sont plus que là, flottant dans l’air de nos temps incertains comme des fourmis sur notre thé. 1991/92, ce n’était pas encore l’Euro-mode et de concert on pouvait aller décoller au cœur d’un curieux vaisseau aérocknef aux gradins de bancs en simples planches de bois. À l’automne/hiver de ces années là, on pouvait y voir le jeune fils et son père applaudir Charles & les Lulus, curieux équipage de bluesmen néerlando-bruxello-flamand tanguant au son des guitares exotiques d’un certain Roland Van Campenhout (Celui là même qui a serré la pogne du Captain Hook John Lee). Et même qu’en ce soir initiatique de blues authentiques de fin de siècle, le fils et le père ont pu voir flotter dans l’air les fantômes de Sonny Boy Williamson, Willie Dixon et danser au bras de La Paloma l’âme tellurique de Monsieur Don Van Vliet. Et le vent bleu qui s’échappe de l’Arnomonica souffle encore Eyesight in the Blind dans leurs têtes alors que l’Euro-Lille se bétonne de la tête aux pieds pour tenter de rivaliser contre la rançon du progrès. De nos vies, souvenez-vous, de même pas plus de 20 ans et voyez ce des fourmis flottant sur notre thé.
25.03.2006

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